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La rancoeur des ouvriers d'Alfa Romeo contre Fiat et les Agnelli (REPORTAGE)
Par Olivier THIBAULT
ARESE (Italie),
16 oct (AFP) - Devant l'entrée principale de ce qui reste du site du groupe
Fiat à Arese, près de Milan (nord), Vincenzo, 28 ans d'ancienneté, se
souvient d'une époque révolue où son usine était le fer de lance de la
marque Alfa Romeo.
"Nous étions 24.000 ici. C'était une ville", indique ce Sicilien
trapu de 54 ans en bleu de travail, un gros écusson aux armes d'Alfa Romeo
sur la poitrine.
"Cette marque, nous l'avons toujours dans le coeur", sourit
Vincenzo, avant de se reprendre: "Fiat, au lieu de nous restructurer,
nous a destructuré".
Aujourd'hui, ils ne sont plus que 2.500 à travailler sur ce site immense.
La partie en activité de la "ville Alfa Romeo" s'est réduite
comme peau de chagrin ces dernières années.
A peine 30% de la superficie est encore en activité. Plus aucune Alfa ne
sort de l'usine depuis deux ans. L'ensemble de la production de la marque
sportive a été transféré dans les autres usines du groupe Fiat, propriétaire
d'Alfa Romeo depuis 1986, date de son rachat à l'Etat italien.
A Arese, ne subsiste que des activités secondaires : production de Fiat
Multipla roulant au GPL ou méthane, fabrication de moteurs V6 et centre d'expérimentation.
La crise aiguë que traverse le secteur auto de Fiat compromet encore un peu
plus l'avenir d'Arese. Le groupe turinois a annoncé la semaine passée un
plan de restructuration pour relancer sa filiale Fiat Auto qui regroupe les
marques Fiat, Lancia et Alfa Romeo.
Au total 8.100 suppression d'emplois sont prévus au sein du groupe. A Arese,
c'est la moitié de l'activité qui doit disparaître, avec le transfert du
montage des Multipla GPL/méthane et du département des véhicules expérimentaux.
1.000 suppressions d'emplois y sont prévues.
Depuis cette annonce, les débrayages, manifestations et blocage de l'autoroute
voisine se succèdent. Mercredi, quelques centaines d'ouvriers et employés
sont rassemblés devant l'entrée principale pour participer à une
"assemblée générale ouverte" organisée par les syndicats.
Des élus des communes environnantes, des membres du conseil régional sont
venus. "Par solidarité", explique Pietro Romano, le maire de la
commune voisine de Lainate.
Une élue régionale, Silvia Ferretto ne mâche pas ses mots, malgré son
appartenance à Alleanza Nazionale (droite), le parti de Gianfranco Fini au
pouvoir avec Silvio Berlusconi.
"La famille Agnelli a toujours réussi à nationaliser les pertes et à
privatiser les profits", lance-t-elle au diapason de la rancoeur des
ouvriers d'Alfa vis à vis de la dynastie du fondateur de Fiat, aujourd'hui
encore au commande du groupe turinois.
Alors que le gouvernement envisage à nouveau d'aider le groupe Fiat pour préserver
les emplois et sauvegarder l'industrie automobile nationale, l'élue
tranche: "il est hors de question de donner un centime de plus à Fiat.
Les Agnelli ont déjà reçu assez d'argent comme cela".
Fiat a touché de la part de l'Etat et de la région des aides pour
fabriquer à Arese des voitures peu polluantes, selon la conseillère régionale.
"Fiat devra rendre des comptes sur l'argent mis sur ce site",
souligne-t-elle.
Pour Mme Ferretto tout comme pour son collègue du conseil régional,
le vert Carlo Monguzzi qui prend le micro devant les employés: "Arese
doit rester un endroit où on produit des voitures écologiques".
Mais pour l'heure, tout le monde attend le résultat de l'initiative
du gouvernement qui promet d'ici la fin du mois un plan "industriel et
financier" pour sauver Fiat Auto et empêcher les fermetures d'usines.
11 heures. L'assemblée générale se termine. Les ouvriers
filent reprendre leur poste. Près de la grille d'entrée reste une grande
boîte en carton imitant un cercueil et portant le nom de Gianni Agnelli, 81
ans, chef de la famille et président d'honneur de Fiat.
FIAT
ot/clr/ag
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